Être neuroatypique, c’est déjà naviguer dans un monde conçu pour des modes de fonctionnement différents. Mais lorsque plusieurs neuroatypies se croisent, comme un trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH) et un trouble du spectre autistique (TSA), le quotidien devient encore plus complexe. Cette superposition, appelée comorbidité, est fréquente dans les troubles neurodéveloppementaux (TND).
Pour ma part, le diagnostic de haut potentiel intellectuel (HPI) a été un premier éclairage. Cependant, il ne m’expliquait pas mes difficultés à organiser mes idées ou à terminer mes projets. Soit je me lançais sur une nouvelle idée avant d’en finir une, soit je m’investissais tellement dans un détail que je perdais de vue mon objectif initial. C’est en explorant davantage que j’ai découvert que ces symptômes correspondaient aussi à un TDAH.
Qu’est-ce qu’un TND ?
Les troubles neurodéveloppementaux regroupent plusieurs conditions qui affectent le développement du cerveau, comme le TDAH, le TSA, les troubles dys (dyslexie, dyspraxie, etc.) et les troubles spécifiques du langage ou des mathématiques.
Les TND peuvent coexister : ainsi, une personne avec un TSA peut aussi avoir un TDAH, ou une dyslexie. Cette association rend parfois les diagnostics plus longs, car certains traits de ces troubles se recoupent.
D’après des études scientifiques, environ 50 à 70 % des personnes avec un TSA présentent également un TDAH. Les résultats selon les études semblent assez varibles. Et pourtant, ces deux troubles ont des manifestations très différentes :
- Le TDAH se traduit par de l’impulsivité, des difficultés de concentration et une tendance à se disperser.
- Le TSA, en revanche, peut s’accompagner de routines rigides et de difficultés dans la communication sociale.
Si vous voulez en savoir plus, je vous invite à lire Autisme et Psychomotricité, ouvrage sous la direction de Julien Perrin, Thierry Maffre et Cindy Le Menn-Tripi. Le chapitre 2 rédigé par la pédopsychiatre Marie Toureille nous donne plus d’éléments sur les comorbidités de l’autisme.
Comment ces comorbidités se manifestent-elles ?
Chaque combinaison de troubles neurodéveloppementaux crée une expérience unique pour l’enfant. Voici trois exemples concrets pour mieux comprendre :
Exemple 1 : Un enfant avec dyslexie, dysorthographie et dyspraxie
Léa, 9 ans, a une dyslexie, une dysorthographie et une dyspraxie.
- Lecture et écriture : Elle lit lentement et avec difficulté. Elle confond les lettres et les sons, ce qui rend la lecture laborieuse et impacte son orthographe. D’autre part, elle intègre difficilement les notions d’étude de la langue.
- Gestes du quotidien : Sa dyspraxie complique l’apprentissage des gestes comme l’écriture manuscrite ou le découpage. En classe, elle peine à prendre des notes rapidement.
- Impact social : Elle peut se sentir découragée face à ses camarades qui finissent leurs travaux plus vite. Pourtant, elle est créative et très douée pour raconter des histoires à l’oral, une compétence qui mérite d’être mise en avant.
Exemple 2 : Un enfant avec TDAH et TSA
Maxime, 10 ans, a un TDAH et un TSA.
- Concentration et impulsivité : Il est distrait par le moindre bruit et a du mal à rester assis. Parfois, il interrompt sans attendre son tour, ce qui peut irriter ses camarades.
- Routines et intérêts spécifiques : En parallèle, Maxime a besoin de routines fixes. Il adore tout ce qui concerne les trains et pourrait en parler pendant des heures, même si ses interlocuteurs décrochent.
- Relationnel : Ses camarades ont du mal à comprendre son comportement imprévisible. Maxime, de son côté, ne perçoit pas toujours les signaux sociaux, ce qui peut entraîner des malentendus.
Exemple 3 : Un enfant avec dyscalculie et HPI
Emma, 11 ans, a une dyscalculie et un haut potentiel intellectuel (HPI).
- Difficultés en mathématiques : Les nombres sont une source de stress. Emma a du mal à comprendre les bases comme les additions ou les fractions. En revanche, elle est capable d’élaborer des raisonnements complexes dans d’autres matières.
- Hyperanalyse : Sa capacité à analyser des situations et à poser des questions sophistiquées surprend souvent ses enseignants, mais elle se sent frustrée par ses résultats en mathématiques.
- Émotions : Ce décalage entre son potentiel et ses difficultés peut la rendre anxieuse, voire perfectionniste, car elle aimerait exceller partout.
Ces exemples montrent que chaque enfant vit ses neuroatypies différemment. La clé est d’adapter les accompagnements pour révéler leurs forces tout en les aidant à surmonter leurs défis spécifiques.
Ce que dit la science
Les chercheurs s’accordent sur le fait que les comorbidités sont courantes parmi les TND. Voici quelques données :
- Neurologie partagée : Les TND partagent des bases neurologiques communes, notamment au niveau du cortex préfrontal, impliqué dans l’attention et la régulation des émotions.
- Diagnostic tardif : La présence de comorbidités peut retarder un diagnostic précis, car les professionnels de santé doivent démêler les manifestations des différents troubles.
- Importance du soutien global : Un accompagnement pluridisciplinaire (orthophonistes, ergothérapeutes, psychologues) est souvent nécessaire pour répondre aux besoins variés des enfants concernés.
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