Quand on a un doute sur la neuroatypie de son enfant, obtenir un diagnostic pour son enfant devient vite un parcours du combattant. Pourquoi les délais sont-ils aussi longs ? Et qu’est-ce qui complique autant le processus ? On vous explique tout.
Un parcours complexe, bien loin d’un simple test
Contrairement à certaines idées reçues, un diagnostic de trouble neuroatypique (TDAH, DYS, TSA…) n’est pas un acte médical ponctuel. C’est un parcours qui mobilise plusieurs professionnels : pédiatre, médecin généraliste, orthophoniste, psychomotricien, neuropsychologue, pédopsychiatre…
Chacun apporte une pièce du puzzle à travers des bilan(s) et des observations cliniques. Il ne s’agit pas simplement de faire passer un test de QI ou une évaluation scolaire : il faut croiser les données, éliminer d’autres causes, observer l’enfant dans différents contextes.
Ce travail de fond prend du temps, surtout quand il y a des troubles associés (comorbidité), ce qui est fréquent chez les enfants neuroatypiques.
Des délais d’attente très longs selon les structures
Malgré la mise en place des PCO (Plateforme de coordination et d’orientation), les délais d’attente sont toujours préoccupants.
Commençons d’abord par expliquer ce qu’est une PCO. Voici la définition qu’en fait ce rapport du Sénat de 2023 : “Les PCO ont pour objectif de permettre une intervention pluridisciplinaire coordonnée immédiate dès le repérage des premières difficultés chez le jeune enfant, sans attendre un diagnostic stabilisé”
Fabuleux programme ! On vote tous pour !
Selon ce même rapport, les délais d’attente pour obtenir un premier rendez-vous peuvent atteindre 18 mois selon les territoires. C’est déjà moins joyeux.
Est-ce que vous connaissiez les PCO ? Moi, non. Enseignante pendant 9 ans, je n’en avais jamais entendu parler pendant ma carrière. Ces structures existent pourtant depuis 2018 et sont présentes dans tous les départements. La stratégie nationale pour l’autisme tentait ainsi de “pallier les difficultés de prise en charge grâce à la mise en réseau des professionnels, à la fois libéraux et institutionnels” (toujours selon ce rapport). “
Le souci est qu’on est toujours confronté à certaines difficultés. En cause :
- la rareté des professionnels formés,
- une demande en forte hausse,
- une mise en place inégale selon les territoires
- la rémunération des professionnels peu attractive dans les PCO (et oui ! un spécialiste, ça se paye !)
Passons directement par le libéral alors !
En libéral, un rendez-vous avec un neuropsychologue ou une orthophoniste peut nécessiter 3 à 9 mois d’attente, selon la région. Par ailleurs, il ne s’agit pas d’aller voir un seul professionnel pour avoir un diagnostic. C’est le croisement des observations et des accompagnements qui rendent la démarche efficace.
Dans leur désespoir, certaines familles parlent même de « tour de France des professionnels » pour tenter d’obtenir un rendez-vous ailleurs plus rapidement. Et encore, certaines vont même à l’étranger.

Des troubles aux manifestations proches
Autre facteur de complexité : les symptômes de nombreux troubles se ressemblent.
Par exemple :
- Le TDAH et le TSA peuvent tous deux inclure des troubles de l’attention.
- Les DYS (dyslexie, dyspraxie, dysorthographie…) peuvent aussi générer des retards d’apprentissage similaires à d’autres profils.
- Un enfant à haut potentiel peut présenter de l’agitation ou un ennui scolaire, confondu avec un TDAH.
Ce phénomène de chevauchement des signes rend le diagnostic plus difficile. Il faut être certain qu’un trouble n’en masque pas un autre, ou qu’il ne s’agit pas simplement d’une souffrance contextuelle (trauma, anxiété, harcèlement…).
D’autres freins souvent invisibles
À ces facteurs s’ajoutent des freins plus insidieux, mais tout aussi puissants :
1. Une méconnaissance persistante des troubles
De nombreux professionnels de l’enfance ne sont pas (ou mal) formés aux TND. Résultat : les premiers signaux sont souvent minimisés, interprétés comme des caprices ou une mauvaise éducation.
2. Des représentations erronées
« Il est intelligent, donc ce n’est pas un trouble », « Elle parle, donc ce n’est pas de l’autisme »… Ces idées fausses retardent l’orientation vers des professionnels compétents.
3. Un manque d’harmonisation nationale
Il n’existe pas de parcours diagnostique standardisé à l’échelle nationale (sauf sur le papier). Chaque territoire s’organise avec ses moyens, ses délais et ses pratiques, ce qui crée des inégalités criantes. Je dirais même que le parcours dépend même du premier professionnel que vous rencontrez. Dans ma région, j’ai discuté avec de nombreux parents concernés qui avaient eu des suivis totalement différents.

Que faire en attendant un diagnostic ?
Même si l’attente est longue, il est possible de mettre des choses en place pour soutenir votre enfant dès maintenant.
À l’école
Demander un PAP (Plan d’Accompagnement Personnalisé), même sans diagnostic officiel, sur la base d’un bilan ou d’un courrier médical. A minima un PPRE peut déjà permettre de mettre en place des choses simples sans diagnostic précis, sans avis médical. Si on vous a parlé d’un PPS, il concerne les élèves relevant de la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées). Ce sera donc, éventuellement, pour plus tard.
Chercher du soutien
Se tourner vers des associations de familles (TDAH France, FFDys, Autisme France, etc.) pour obtenir écoute, infos et conseils.
Participer à des groupes d’entraide (en ligne ou en local). Vous n’êtes pas seul.e ! Par contre, les informations étant rarement claires sur ces sujets, méfiez-vous des “moi, je sais ce que tu devrais faire” que vous allez entendre ou lire. Il n’y a malheureusement rien de simple. Chaque situation est particulière. La vôtre aussi.
Consulter des professionnels sensibilisés
Certains professionnels formés aux TND acceptent de travailler en amont d’un diagnostic, pour aider l’enfant à mieux vivre son quotidien.
Sur notre site, vous pouvez trouver des profils de professionnels bienveillants, habitués aux enfants neuroatypiques.
Si vous sentez que votre médecin ou votre psy ne connaît rien aux TND, allez voir ailleurs. Attention, je ne vous incite pas non plus à retourner tous les cabinets médicaux jusqu’à ce qu’un spécialiste soit d’accord avec vous. Peut-être que le profil de votre enfant est différent de ce que vous envisagiez.
Conclusion
Obtenir un diagnostic de trouble neuroatypique est souvent un chemin long et semé d’embûches, entre délais, doutes, erreurs d’orientation, et manque d’information. Mais comprendre les raisons de cette complexité permet de reprendre du pouvoir sur le processus.
En attendant le diagnostic, il existe des solutions concrètes pour ne pas rester seul : accompagnement scolaire, soutien familial, aides extérieures. Et surtout : vous n’avez pas à affronter ce parcours sans ressources.
Enfin, n’oubliez pas que quel que soit le diagnostic qui sera posé, il existe toujours des choses à mettre en place pour valoriser les réussites et les particularités de votre enfant.
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